Sarko 2007-2012, le Best-of, épisode 14 : "Mouammar, mon ami"

Publié le par l'agora de Bretagne

A l'occasion des élections présidentielles, et pour se détendre (ou se faire peur c'est selon), l'agora de Bretagne vous offre un petit voyage dans le temps. Revenons en 30 jours sur 30 évènements symboliques de période Sarkozyste. L'agora de Bretagne est heureuse de vous proposer, Sarko 2007-2012, le Best-of !

En ce 18 Avril 2012, N°14 : Mouammar, mon ami

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Hier matin, le 17 avril 2012, au micro de France Inter, Nicolas Sarkozy déclarait : « Il n'a jamais été question de vendre une centrale à monsieur Kadhafi. S'il y a bien dans le monde un chef d'Etat qui n'a pas frayé avec monsieur Kadhafi, et est responsable de son départ et de ce qui lui est arrivé, je pense peut-être que c'est moi ». A partir de là, trois possibilités. Soit Nicolas Sarkozy manie lui aussi l'humour « correzien » à la Jacques Chirac. Soit Nicolas Sarkozy pense que les médias sont étanches et qu'une déclaration sur France Inter ne sera ni analysée, ni reprise sur un autre média, même pas sur le Net. Soit l'actuel Président, prend les français pour des imbéciles. Chacun fera son choix mais il ne paraît exister d'autres alternatives.

Cette déclaration du Président actuel fait suite à la parution du livre d'Anne Lauvergeon, ancienne collaboratrice de François Mitterand à L'Elysée qui s'est fait connaître à la tête du groupe Areva, pilier du nucléaire français. « Atomic Anne » règle ses comptes dans un livre, avec l'actuel Président, suite à son débarquement brutal de l'an dernier. Elle y affirme que Nicolas Sarkozy a voulu mettre en place une collaboration sur le nucléaire civile avec la Lybie sur les conseils de son ami (et ennemi intime d'Anne Lauvergeon) Henri Proglio que le Président a placé à la tête d'EDF. Beaucoup d'éléments confirment cette hypothèse et sont rassemblés dans un article du monde, daté de ce jour1.

«C’est mon ami, mais je crois qu’il est devenu fou. Il souffre d’une maladie psychique». Voilà ce que déclarait M. Kadhafi dans une interview enregistrée par la chaîne allemande RTL, le 15 mars 2011. Son « ami » avait visiblement oublié leur amitié, en ce mois de mars où le peuple lybien se révolte, seul. Sarkozy n'était pas devenu fou en mars 2011 mais il était visiblement parfaitement inconscient en décembre 2007, lorsqu'il déroula le tapis rouge pour son ami. Cinq jours durant, le dictateur sanguinaire, indésirable durant des décennies en Europe, était reçu par Nicolas Sarkozy. Le faste, le folklore associés à cette visite sont restés dans les mémoires. Le « Guide » est logé à l'hôtel Marigny où il débarque avec sa tente, ses amazones de sécurité et ses chameaux pour faire bonne mesure. Il visitera aussi, en VIP, le château de Versailles, fermé au public pour l'occasion. Interrogé par David Pujadas sur France 2, Mouammar Kadhafi déclarera que les droits de l'homme n'ont pas fait parti des sujets abordés lors de ses discussions avec le Président de la République.

Cette visite était consécutive à la libération des infirmières bulgares quelques mois plus tôt. Libération que Nicolas Sarkozy s'était auto-attribué. Plus exactement, il en avait attribué le mérite à Cécilia, sa désormais ex-épouse, sans doute pour la convaincre qu'elle pouvait jouer un rôle dans l'Histoire en restant à ses côtés. Nicolas Sarkozy se déclarait donc heureux de recevoir le Guide à Paris. Cette visite précédait la création de l'Union pour la Méditerranée cher à Nicolas Sarkozy et dont il comptait faire de Kadhafi, un des fers de lance.

On connait la suite. Le pouvoir français n'a pas vu venir le printemps arabes. Dépassés par les évènements et même à contre-courant en Tunisie et en Egypte, le gouvernement et Nicolas Sarkozy ont profité de l'enlisement du conflit Lybien pour venir jouer les sauveurs à Benghazi et tenter de redorer un blason terni. Tardivement. Très tardivement. Beaucoup trop pour que cela puisse paraître spontané.

Il reste un volet, non encore clarifié à cette relation tumultueuse : il y a-t-il eu financement par le colonel Kadhafi, de la campagne du candidat de l'UMP en 2007 ? L’un des fils de Kadhafi, Seif al-Islam, le 16 mars 2011, déclarait : "C’est nous qui avons financé sa campagne et nous en avons la preuve". On sait aussi que Nicolas Sarkozy avait pris langue avec les services secrets lybiens lorsqu'il était Ministre de l'Intérieur, dans le cadre de la lutte contre « l'islamisme radical ». Il l'a lui-même confirmé en décembre 2007, au moment de la visite du dictateur.

Nicolas Sarkozy aura donc, une nouvelle fois, avec Kadhafi, raté un rendez-vous avec l'Histoire. Il a même été proche d'installer une centrale nucléaire sur le sol lybien, sol instable mais rentable, quelques mois seulement avant la chute du « Guide de la Révolution Lybienne ». Espère-t-il, en 2012, nous faire croire qu'il aura été impitoyable avec le colonel Kadhafi ? Ce ne serait pas raisonnable et d'impitoyable, il risque fort, de perdre l' « im » pour ne rester que pitoyable. A moins que le mensonge éhonté ne soit préférable à la vérité. La vérité serait donc si terrible ? 

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